Voici un extrait de « la vie est un parfum, respirez-la », publié en 2017. La scène se passe en 6014.

« Robin est en retard. Il gravit les marches en courant, se présente à l’accueil essoufflé, puis reprend sa respiration avant d’entrer dans le grand auditorium. C’est un jour spécial aujourd’hui… le congrès mondial annuel des WWI. Les World Wide Institutions. Et cette année, c’est à Paris qu’il se tient.

De nombreuses organisations supranationales ont émergé grâce à l’atténuation des égos des Etats et des hommes qui les gouvernaient. Ces organismes ont pour vocation de maintenir l’ensemble dans un équilibre holistique. Les comportements parasitaires sont toujours là, intrinsèques à l’être humain. Chacun a sa part d’ombre et de lumière, l’une et l’autre étant corrélées et proportionnelles. Mais cela a permis de réguler et de contrôler.

Ces organismes posent le cadre et prennent les décisions importantes quant à la gouvernance du monde. Ils ont deux vocations :

– la première est de mettre les pouvoirs éthiques et moraux au même niveau que le pouvoir économique. Jusqu’à ce que ces institutions se créent, les gardiens de l’éthique et de la morale étaient les Etats. Mais, les entreprises, elles, étaient mondialisées et ne s’arrêtaient pas aux frontières. Certains dirigeants avaient intégré l’éthique et la morale dans leurs politiques, mais leurs raisons d’être restaient régies par les intérêts économiques.

Les organismes supra-nationaux sont en quelque sorte le système immunitaire de la Planète. Les Etats-nations, de leur côté, ont réorienté et renforcé leur rôle dans la consolidation, l’encouragement et la protection des initiatives locales.

La deuxième vocation de ces organismes, au delà de cet aspect de contrôle, est de jouer un role clé dans l’évolution de l’humanité, par les orientations données à la recherche, grâce à la vision globale qu’elles engendrent. Elles ont permis de décloisonner les raisonnements, prenant en compte l’humanité et la planète dans leur entièreté. Et ce Congrès annuel permet une convergence, car c’est à ce moment là que se créent des groupes de travail transverses entre les institutions en fonction des enjeux et des problématiques du moment. Ce système est vertueux à condition de ne pas devenir unique, car de par son essence, il crée un appareil qui favorise le conservatisme, la linéarité des choses, et la concentration des pouvoirs. En ce sens, il doit laisser des espaces de liberté importants exister par ailleurs, et ce dans toutes les disciplines, de l’art à la science. L’art “académique” ne laisse pas d’héritage aux générations futures, car il est perfusé par les réalités économiques, modifiant ainsi sa finalité, et donc son essence. Et c’est le mode de vie choisi par les humains en 6014 qui permet à chacun de se connecter à l’art en tant que créateur s’il le souhaite.

 

Quant à la science, elle peut devenir dogmatique à son insu, et nécessite, pour avancer, des ruptures et des recherches disruptives, nécessitant de sortir du cadre, et souvent, de se trouver aux frontières entre l’acceptable et l’interdit. C’est ainsi que certaines découvertes essentielles mettent beaucoup de temps avant d’être acceptées comme nouveaux paradigmes. La diversité en matière de choix des directions données à la recherche est primordiale pour le progrès de l’Humanité et l’expression de la liberté des scientifiques. Il n’est pas rare que ces derniers travaillent à la fois pour le secteur public et privé, une mission en Terriens, une mission en Gavroches pour les Parisiens… il n’y a pas de conflits d’intérêts, car le système de brevets a disparu. Toutes les découvertes faites par le domaine privé tombent immédiatement dans le domaine public. Ainsi, il n’y a plus de compétition exacerbée dans la course aux brevets, mais une coopération symbiotique qui vise à l’amélioraiton du système au bénéfice de tous.

Robin prend place au fond de la salle, prêt à se plonger dans ces trois jours intenses.

Cinq rangs juste devant lui, une tête châtain avec un peu de sel dans le poivre écoute attentivement ce qui se passe devant elle, dans l’ignorance totale de ce qui est derrière… »

Pauline Dumail

 

Et si cette crise que nous traversons nous obligeait à prendre conscience des dysfonctionnements de notre société et à prendre les mesures nécessaires pour rectifier tout cela ?

A bientôt.

 

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